Le CNR ?

A quelques jours du premier tour des élections législatives, Emmanuel Macron a promis la mise en place d’un « Conseil National de la Refondation » comme gage d’un changement de méthode pour le futur quinquennat. La référence explicite, via l’acronyme, au Conseil National de la Résistance, a de quoi interroger mais aussi indigner.
Dès 1943, le programme du Conseil National de la Résistance, qui sera largement mis en œuvre, comprend notamment « un plan complet de sécurité sociale » et « des retraites étendues à toutes les catégories de salariés ». Or, dans sa nouvelle formule, le président a prévenu : sur les retraites, par exemple, le CNR devra discuter dans le cadre du recul de l’âge de départ posé comme un préalable.
On s’inscrit ainsi dans la dynamique exactement inverse à celle voulue à la Libération et qui constitue encore aujourd’hui une grande partie des acquis sociaux, on reprend l’acronyme « CNR » pour faire l’inverse de l’ambition qu’il affiche, on dévoie la référence.
Et cette proposition s’inscrit dans un contexte où, depuis 2017, la contestation du rôle des syndicats comme acteurs de la démocratie sociale est assumée.
Les « ordonnances Macron » de 2017 qui ont affaibli les instances de représentation du personnel dans le privé, la loi de transformation de 2019 qui en a été le pendant pour la fonction publique, avec en particulier la fin du contrôle des actes de gestion dans des commissions paritaires, ont été décidées au nom de la fluidité, de l’agilité, et du fait que la société civile n’avait plus sa place dans un modèle où seul compte le dialogue direct entre un chef et un peuple d’individus. Tant que ces mesures ne sont pas remises en cause, on peut émettre de sérieux doutes sur le changement de cap.
Et dans le doute, il ne faut pas s’abstenir les 12 et 19 juin pour battre toutes les solutions autoritaires, y compris celles qui tentent de se dissimuler sous des acronymes vendeurs.